Bonjour,
Je prends le temps de te répondre, je ne suis pas une conjointe, je suis une malade (RCH aussi) mais je voulais quand même te donner mon ressenti.
La première chose : ne te sens pas coupable, surtout pas. Ce qui arrive c’est lourd, c’est épuisant, c’est décourageant , c’est d’une brutalité sans nom et ça bouffe tout. Je te comprends totalement et je ne te trouve pas du tout égoïste. Egoïste de quoi ? De voir que vous en prenez plein la face et d’accuser le coup ? Non, ne te sens pas égoïste ou coupable !
De mon côté tu vois, c’est moi qui me sentais coupable d’être un boulet et d’infliger toutes mes souffrances et tout ce bordel de traitements, de faiblesses, de sautes d’humeur à mon conjoint. Y’a des fois ça me traversait l’esprit de lui dire de me laisser là, avec ma RCH de m**** ,et de s’épargner tout ça(c’est dire … ). Donc tu vois, la culpabilité, ça peut être des deux côtés mais au final ça sert à rien parce que ni toi ni lui n’y pouvez rien.
Pour ce qui est des sorties et de la vie sociale, c’est sur que ça prend un coup dans l’aile … Moi je tenais à ce qu’il fasse sa vie. En gros, par exemple : proposition de sortie avec des copains, si j’étais en état / motivée , je tentais le coup et j’allais avec lui (alors c’est sur, avec le risque de devoir écourter les réjouissances ;/ ), sinon ben je l’encourageais à sortir quand même pour qu’il y’en ait au moins un des deux qui respire et ça ne m’a jamais fait de peine , je ne me suis jamais sentie abandonnée. Justement, il me ramenait un peu d’air en me racontant ce qu’il avait fait, si c’était bien … tout ça en nous disant que quand j’irais mieux, moi aussi j’en profiterais. Moi, ça me faisait du bien de me dire qu’il se changeait les idées. C’est pour ça que je pense qu’il faut que tu te ménages des bols d’air. Il n’y a rien d’égoïste à ça.
Sinon, « techniquement », y’a t’il des moments de la journée où il se sent mieux que d’autres ? C’est relou de fonctionner en fonction de la maladie mais si ça permet de caler des sorties ou des visites … Par exemple si c’est la matinée qu’il se sent le mieux, pourquoi pas tenter un « brunch » avec vos amis ? S’il est en régime sans résidu, il pourrait peut être quand même profiter si y’a moyen qu’il mange des tartines grillées, des oeufs, du jambon, du fromage …
Que te dire d’autre pour t’aider ? C’est vraiment personnel (donc pas forcément opérationnel avec ton homme) mais voici les points qui me viennent.
Avec le recul, je me dis que mon conjoint était présent pour m’aider mais il ne m’a jamais maternée . Il m’a toujours laissé faire ce que je pensais pouvoir faire pour que je garde (l’impression d’avoir toute) mon autonomie. Truc con : la vaisselle, ça pouvait réellement être une épreuve pour moi de la faire (toi aussi va 4 fois aux chiottes alors que t’as trois assiettes et deux couteaux à laver) mais dès fois je m’y mettais et ça m’aurait saoulée qu’il m’enlève l’éponge des mains pour me renvoyer sur le canapé « pour pas que je me fatigue ». Bon après, y’a un paquet de fois ou il a du finir des trucs à ma place (héhéhé ;p) mais je crois que c’était pas mal pour moi de garder la main autant que je pouvais sur la vie quotidienne sans qu’il prenne les devants à m’assister pour tout.
Les fois où j’étais d’une humeur abominable : là, y’avait rien à me dire et rien à me faire à part qu’il me foute une paix royale jusqu’à ce que je reprenne les communications … Trop sympa pour le conjoint je sais… -_-
Le mantra de ma mère qui parfois me donnait envie de la taper mais qui est tellement vrai et m’a permis d’être indulgente envers mon pauvre corps et mon pauvre état qui ne s’amélioraient pas vite : un jour après l’autre. Modestement et patiemment. Faut pas se projeter trop loin sinon on explose.
Pour ce qui est de l’efficacité des médicaments, malheureusement, ils sont plus long à nous retaper que la maladie à nous foutre en l’air . Faut que ça « imbibe ». Eventuellement, n’hésitez pas à vous renseigner sur des protocoles de recherche sur de nouvelles molécules à l’essai, ça peut marcher.
En conseil lecture et qui pourrait être un support un peu sympa pour mettre des mots sur ce que vous vivez toi et ton homme (et peut être à en parler parce que je pense que parfois il faut que ça sorte) : la BD « Carnet de Santé Foireuse » de Pozla. L’auteur a la maladie de Crohn et raconte ses « aventures » : c’est rude (il en bien bavé, il s’est fait opérer et compagnie) mais vraiment bien foutu et assez drôle malgré le sujet . Il met aussi en scène sa femme dans tout ça et c’est bien fait.
Auprès de l’AFA, si tu as besoin de discuter ou de poser des questions il y’a des permanences d’écoute par téléphone ou parfois même en « live » dans les hôpitaux, des rencontres pour discuter (MICI Kawas), y’a un groupe MiCI jeunes … Tu peux essayer de voir ce qu’il y’a dans ta région.
Bon, voilà, c’est long et c’est fouilli mais c’est proportionnel au temps passé depuis ton post … ;p
En tout cas ne culpabilise pas, c’est rude d’être un « aidant » , tu n’es pas malade mais tu as le droit d’avoir des coups de mou.
Courage et bises ! (j’espère que la dernière injection de Rémicade a un peu amélioré les choses pour ton homme !)