Vendredi 8 septembre 2017
Je te déteste – 5 mois et 5 jours que je te déteste.
Cela fait 5 mois et 5 jours que le gastroentérologue m’a donné le verdict, posé le diagnostique.
Cela fait 5 mois et 5 jours que ma vie a basculé, que tout s’est effondré.
Je ne suis jamais tombée aussi bas à cause de toi. A 30 ans, j’ai eu l’impression que ma vie était terminée. Et j’ai pensé à mon fils, 4 ans, et je me suis dit que cela allait être encore plus difficile de devoir te surmonter et te faire face pour mon fils, pour que mon fils ne perde pas sa maman dans la démence dans laquelle tu me faisais sombrer.
20 à 25 fois par jour – cela a été mon quotidien dès le mois de janvier 2017.
20 à 25 fois par jour de passage aux toilettes à me demander si je ne devenais pas folle ou même incontinente.
20 à 25 fois par jour à se dire qu’on est une grosse merde, qu’on ne sert à rien à part aller aux toilettes.
Votre entourage vous regarde de travers « Tu es trop stressée. » « Tu y penses trop. »
Ma réplique préférée : « Ce ne serait pas un peu dans ta tête ?… »
Oui bien sur, c’est ce que je me suis dit – tout ça c’est dans ma tête. La vie est trop stressante, le quotidien, partir partout, déposer son fils à l’école, aller travailler, rentrer manger et retravailler (j’ai une société de secrétariat en supplément de mon travail), retourner travailler, rentrer, doucher le petit, passer à table, le coucher, retravailler……tout le monde, enfin la plupart des gens, connaissent ce train train quotidien, comme on dit.
Tout le monde le subit, plus ou moins bien.
Mais alors ? Suis-je trop faible ? C’est ce que je me suis dit. Je suis une faible. Ce genre de personne qui n’assume pas sa vie – qui n’est pas heureuse – qui part en burn out pour la moindre contrariété. Mais non, ce n’est pas moi. Je suis heureuse, du moins je l’étais, je me le disais tous les jours. Pas pour me convaincre à moi-même. Non je le sais – j’étais heureuse.
Un petit garçon, un conjoint, une maison, un travail, et la boite que j’avais créée.
J’étais heureuse. Alors pourquoi je serai stressée au point de faire des allers-retours aux toilettes à longueur de journée ??? Pourquoi ????
Mon mèdecin (enfin une de ses remplaçantes car mon médecin n’est quasiment jamais présent à son cabinet) a d’abord cru que j’avais attrapé une bactérie. J’ai fait des analyses, pris des antibios, mais rien n’y fait. Ca continue. Des envies pressantes, même extrêmement pressantes de devoir aller aux toilettes. La gêne bien sur s’accompagne avec ses envies.
Et puis le dégoût de soi-même. On se sent sale – extrêmement sale. Il y a des détails qu’on ne peut pas expliquer à son entourage – même à la personne la plus intime.
Et un jour, je vois du sang. Je vais aux toilettes pour la énième fois de la journée, et en regardant je vois du sang. Je me suis dis « mince ça ce n’est pas bon signe ».
Et j’ai laissé courir. J’ai laissé courir parce que j’en avais marre de passer mon temps chez le médecin jamais présent, et qui ne savait même pas ce que j’avais.
Et puis ensuite, il y a eu des glaires. Je ne savais même pas que c’était possible à cet endroit !
On se dit « mais c’est pas possible, je ne tourne pas rond ».
Un soir que je bossais tard dans le salon, mon conjoint s’était endormi, mon fils depuis un moment, et mon chat aussi (pour dire que je n’étais plus que face à moi-même), j’ai tapé « sang et glaires dans les selles » dans la barre de recherche Google.
RECTOCOLITE HEMORAGIQUE
Maladie auto immune
Sang et glaire dans les selles
Très fréquentes envies ou fausses envies d’aller à la selle plusieurs fois par jour
Fièvre et nausées, vomissements parfois
Maux de ventre
Ballonnements
Les patients sont exclus de toute vie sociale.
Ont besoin d’un suivi psychologique……
J’ai su que c’était ça. Je me suis effondrée en larmes, et j’étais toute seule face à moi-même, et face à toi qui est arrivée dans ma vie comme un boomerang.
Tu m’as volé ma vie.
Je te déteste.